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Entretien avec une ergonome Sorties scolaires : comment mieux prévenir les risques ?Le climat scolaire en 2011 dans le 1er degré : entretien avec Eric Debarbieux
Éric Debarbieux, en quoi cette enquête sur le climat scolaire en 2011 dans le 1er degré est-elle inédite ?
Cette enquête, une étude du climat scolaire en 2011, constitue le 1er éclairage national de la victimation des enseignants et des personnels des écoles maternelles et élémentaires. Plus de 11 800 personnels du 1er degré ont répondu en ligne à cette enquête, inédite par son ampleur. Elle a été menée par voie électronique et a été relayée par la Fédération des Autonomes de solidarité et plusieurs syndicats d’enseignants du premier degré. Concernant la représentativité des répondants, l’échantillon est proche des statistiques de l’Education nationale et couvre toutes les zones d’affectation, des personnels des zones de montagne aux ZUS (zones urbaines sensibles).
À quels types de violence sont confrontés les personnels du 1er degré ?
Cette enquête nous a permis de vérifier, à l’appui de données quantitatives, certaines intuitions de terrain, notamment par les signalements faits aux Autonomes de Solidarité Laïque.
Premier enseignement, les violences physiques en direction des personnels sont rares : 5,6% des répondants victimes de violence ont été bousculés ; 3,6% ont été frappés ; 0,04% ont été blessés par une arme. Bien sûr ces faits sont graves lorsqu’ils se produisent, mais cette enquête ne reflète pas une école horriblement dangereuse sur le plan de la violence physique.
La violence subie par les personnels du 1er degré est essentiellement de la violence verbale. Elle se situe au cœur de la relation pédagogique car les parents d’élèves sont en première ligne. 20% des personnels déclarent par exemple avoir été insultés par des parents. Les violences commises par des intrus sont rares, ce constat remet en question le développement de la vidéosurveillance dans les écoles maternelles et élémentaires.
Autre point important, les actes de violence répétée sont concentrés sur un faible nombre de personnels : 8,3% des personnes interrogées. Par ailleurs, 14% des répondants déclarent se sentir harcelés.
Dans ce contexte, le climat scolaire est-il perçu de façon positive ?
Pourtant, le climat dans les établissements du 1er degré reste bon. Une énorme majorité des personnels, 91,6% des répondants, considèrent le climat scolaire comme bon ou plutôt bon. Il existe encore un bonheur pédagogique !
Toutefois, les jeunes enseignants (moins de 6 ans d’ancienneté) apparaissent plus négatifs sur le climat scolaire, surtout lorsqu’ils travaillent dans l’éducation prioritaire. Un quart des jeunes enseignants travaillant dans l’éducation prioritaire ont ainsi exprimé une vision négative du climat scolaire.
Constatez-vous des inégalités face au risque d’être victime de violence ?
L’enquête a notamment constaté que les enseignants des zones d’éducation prioritaire sont particulièrement exposés.
Ainsi ces personnels ont deux fois plus de chances d’être victimes de violence de la part de leurs élèves. Le risque d’être victime à répétition de violences est quatre fois plus important selon que l’on exerce dans les écoles les plus défavorisées ou les plus favorisées. Ces personnels-là ne sont pourtant pas payés 4 fois plus ! Ce risque s’accroît en fonction de l’âge. Ce constat remet ainsi en cause la nomination des jeunes enseignants dans l’éducation prioritaire.
Cette enquête permet de vérifier une norme internationale : la victimation des personnels est en France beaucoup plus sensible à la norme sociale que la victimation des élèves.
Une partie de l’étude porte sur les comportements agressifs des élèves, quelles sont ses conclusions ?
Grand enseignement de l’enquête, 37% des personnels interrogés reconnaissent avoir eu au cours de l’année des problèmes fréquents avec des enfants « gravement perturbés ». Ces problèmes sont rencontrés plus fréquemment dans les secteurs socialement défavorisés [rapportés par 1 enseignant sur 2 en zone urbaine sensible ou en établissement professionnel], mais sont loin d’être absents dans les zones favorisées [rapportés par 1 enseignant sur 3 hors des ZUS et 1 sur 5 en zone considérée comme très favorisée].
Les personnels apparaissent comme démunis, notamment face à des comportements agressifs lourds. 24 % d’entre eux ont dû demander l’orientation des élèves « perturbés » vers des structures spécialisées, 8% mentionnent des exclusions pour des problèmes de comportements agressifs. La loi de 2005 sur l’intégration des enfants handicapés a, selon moi, marqué une étape importante de l’histoire de l’école primaire. Ces éléments montrent à quel point il y a un déficit de compensation, de prise en charge et de formation face à ces enfants.
Quelles sont les attentes de ces personnels ?
Une partie de l’étude porte sur les inquiétudes des personnels et leurs propositions d’amélioration du métier. Je m’attendais à ce qu’ils demandent d’abord des moyens. Mais arrive en 1er le sentiment de difficultés avec les parents. Viennent ensuite des critiques par rapport à la hiérarchie, puis la revendication de moyens supplémentaires.
Le pilotage global de l’Education nationale est remis en cause de manière forte, 47 % des directeurs disent par exemple avoir des mauvaises relations avec les IEN (Inspecteurs de l’Education nationale). Cette remise en cause n’exprime pas que les personnels ne veulent pas de hiérarchie, mais qu’ils ont besoin de soutiens, d’une présence de terrain plus forte et non culpabilisante. Le besoin de formation ressort également de ces attentes, principalement sur la gestion et la tenue de la classe.
Une enquête similaire sur les personnels du 2nd degré va être lancée, quels sont ses enjeux ?
Cette enquête nationale sera probablement lancée début décembre. Des enquêtes ont déjà porté sur les collégiens ou les personnels de direction, mais pas sur les personnels enseignants du 2nd degré. Certaines comparaisons vont se révéler intéressantes, en fonction des disciplines d’enseignement, des formations reçues, mais aussi dans le rapport avec la hiérarchie. La part de victimation directe par les parents sera probablement moindre que dans le 1er degré.