1. Me Sébastien Bach, comment est élaboré un règlement intérieur à l’école, dans le primaire et le secondaire ?

Pour le primaire, le Code de l’éducation prévoit que le DASEN (Directeur académique des services de l’Éducation nationale) établit le règlement départemental type. Afin de l’aider dans cette tâche et pour s’assurer du respect de la réglementation, le Ministère a établi des circulaires facilitant la rédaction de ce document standardisé.

Sur une telle base, le directeur de chaque école établit le règlement intérieur dans le primaire pour l’adapter aux spécificités locales. Le Conseil d’école vote alors le règlement intérieur.

Dans le secondaire, c’est la direction de l’établissement qui établit ce document en concertation avec les membres de l’équipe pédagogique. Le règlement intérieur dans les collèges et les lycées est alors soumis au conseil d’administration, puis au contrôle du Recteur avant de pouvoir entrer en vigueur.

La situation du secteur privé diffère un peu. Le principe de leur libre organisation leur permet d’adopter leur propre règlement intérieur.

 

2. Quelle est sa valeur juridique ?

Le règlement intérieur s’impose aux membres et usagers de l’établissement. Il doit être conforme aux normes juridiques supérieures, notamment la Constitution et la Loi. Cette soumission ne l’empêche pas d’être contraignant. Il pose les règles qui légitiment l’action des directions. Il a donc une vocation « pédagogique » à l’attention des usagers et de la communauté éducative. En outre, ce document fixe également des règles impératives dont la violation entraine, le cas échéant, des sanctions ou des mesures coercitives.

Disposant d’articles normatifs ou informatifs, le règlement intérieur a donc une double nature.

 

3. Peut-il être censuré ?

Instrument de la mise en œuvre de politiques publiques, le règlement intérieur doit se conformer à la réglementation qui lui est supérieure. Dans un tel cas, sa remise en cause par voie juridictionnelle est délicate.

L’exemple du port des signes religieux est topique.

La Loi interdit la manifestation par les élèves de leur croyance par le port de signes religieux. Ainsi, un règlement intérieur peut prohiber l’affichage ostensible d’un tel signe par les élèves.

Concernant les parents accompagnant les sorties scolaires, leur situation semble s’être stabilisée. Après des hésitations, la jurisprudence administrative la plus récente a confirmé l’impossibilité d’évincer un parent désireux d’accompagner une sortie scolaire au prétexte qu’il porte un signe religieux.

Le cas du secteur privé mérite une attention spécifique. Par application du principe de libre organisation des établissements du privé, la jurisprudence admet que ces établissements peuvent en effet imposer aux parents de ne pas pénétrer dans leur enceinte en affichant un signe religieux.

Les juges semblent distinguer l’adhésion des familles aux contraintes figurant au contrat les unissant aux établissements privés alors que dans le secteur public le tissu normatif est imposé aux familles par les autorités. Dans le premier cas, les familles se soumettent volontairement et ne peuvent que difficilement critiquer le règlement. Dans le second cas, le règlement est imposé et nécessite donc la possibilité d’être contrôlé par le Juge.

Pour autant, le règlement intérieur n’est pas sans limite.

Régissant les rapports entre acteurs du service public de l’enseignement, le règlement intérieur impose un certain nombre d’atteintes à leurs droits. Si les prescriptions du règlement violent les textes qui s’imposent à lui et dépassent les sujétions normales de la vie en société, la censure du juge intervient.

Il en va ainsi lorsqu’est posée une mesure générale et absolue d’interdiction de tout couvre-chef. Attentatoire de manière disproportionnée à la liberté d’expression et à la vie privée des élèves, cette mesure doit être annulée.

Le règlement intérieur ne peut pas non plus affaiblir la portée de la Loi. Ainsi, un tel document prohibant partiellement l’interdiction de fumer dans l’enceinte de l’établissement est contraire aux lois qui interdisent de manière absolue de fumer dans ces lieux. Il doit là aussi être annulé en tant qu’il est improprement limité.