Diffamation : définition et exemples

« Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. »

La liberté d’expression est un droit fondamental, dans la limite du respect de l’intégrité morale des personnes. Quand cette limite est dépassée, on parle de diffamation au sens de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse(2) :

« Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. »

Le délit de diffamation est caractérisé lorsque les faits allégués constituent une atteinte à l’honneur et à la réputation d’une personne. Deux faits justificatifs permettent toutefois d’écarter la responsabilité de l’auteur des propos :

  • La bonne foi. Si l’auteur rapporte la preuve de la vraisemblance des faits allégués, qu’il est légitime d’aborder le sujet et que sa démarche est objective et son expression mesurée, il peut être relaxé.
  • L’exception de vérité. Si les faits allégués sont exacts, que l’auteur parvient à démontrer la preuve des faits allégués, la responsabilité pénale de l’auteur des propos peut être écartée. L’exception de vérité ne peut pas être invoquée si les propos diffamatoires touchent à la vie privée de la victime, à moins que les propos portent sur des faits d’agression sexuelle sur mineur.
Diffamation, dénonciation calomnieuse ou injure ?

La diffamation, l’injure et la dénonciation calomnieuse sont des infractions qui sanctionnent le préjudice causé à l’honneur d’une personne :

  • La dénonciation calomnieuse porte sur une dénonciation mensongère de faits qui sont sanctionnées par la loi ou par la hiérarchie. Elle est adressée à une autorité.
  • La diffamation porte sur des faits précis qui portent atteinte à l’honneur d’une personne.
  • L’injure est constituée d’expression outrageante, termes de mépris ou invectives. L’injure et la diffamation sont caractérisées, peu importe que les propos soient oraux ou écrits, proférés ou non en public, et quelle que soit l’audience.
Quelle est la différence entre diffamation publique et non publique ?

La diffamation est non publique lorsque les propos restent dans la sphère privée, et sont entendus par l’entourage relativement proche de la victime. On parle de « communauté d’intérêt ».

Exemples de diffamation non publique :

  • Deux collègues se disputent en salle de réunion, l’un accuse l’autre d’être violent avec ses élèves.
  • Sur son compte Facebook privé, accessible uniquement à son cercle d’amis restreint, un adolescent écrit que son éducateur a un comportement pervers.

La diffamation est publique quand les propos diffamatoires sont accessibles à des personnes extérieures à un groupement lié par une communauté d’intérêt. La diffamation publique prend des formes multiples.

Exemples de diffamation publique :

  • Des propos oraux criés dans la rue à la sortie d’un collège incriminent un professeur, l’accusant d’harcèlement sur ses élèves.
  • Un « défi » TikTok incite les élèves à contester les enseignements d’un de leurs professeurs et à proférer des paroles racistes à son encontre.
  • Un dessin publié sur Instagram, sur un compte ouvert, fait la caricature d’un animateur en exagérant des caractéristiques physiques.
  • Un post Facebook d’un parent d’élève met en doute l’impartialité d’un éducateur et lui prête un comportement homophobe.

Exemple jurisprudentiel : en 2023, le tribunal correctionnel de Grenoble a condamné une professeure d’histoire-géographie pour diffamation. Elle avait traité deux de ses collègues de racistes et de négationnistes sur Twitter(3).

Quelles sont les sanctions pénales de la diffamation ?

La diffamation non publique, à condition de porter plainte, peut être sanctionnée d’une amende de 38 euros. Le montant de l’amende atteint 1 500 euros lorsque les propos sont fondés sur un motif raciste ou discriminatoire. 

Si la victime est un enseignant, la sanction est portée à six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende(4), sur le fondement du délit d’outrage à agent.

L’auteur de la diffamation publique est sanctionné par une amende d’un montant pouvant aller jusqu’à 12 000 euros. La sanction est aggravée dans deux circonstances :

  • Quand la diffamation a un motif raciste ou discriminatoire, l’auteur des propos risque un an de prison et 45 000 euros d’amende.
  • Si la personne diffamée est un agent public, et si les propos sont en lien avec ses fonctions, l’auteur risque 45 000 euros d’amende et une peine d’intérêt général. Dans l’enseignement public, les enseignants bénéficient ainsi d’une protection renforcée.

En plus des amendes et des peines de prison, l’auteur de la diffamation peut être condamné à verser des dommages et intérêts pour réparer le préjudice moral de la victime.

Comment agir en tant que victime de diffamation ?

« Il est recommandé d’agir rapidement. Les faits en effet se prescrivent dans un délai très court de trois mois. Au-delà, l’action publique devant une juridiction pénale ne sera plus recevable. »

Quand un enseignant, un animateur ou un éducateur est victime de diffamation, il est recommandé d’agir rapidement. Les faits en effet se prescrivent dans un délai très court de trois mois. Au-delà, l’action en justice devant une juridiction pénale n’est plus recevable. Une autre raison justifie d’agir vite : lorsque l’auteur profère des propos diffamatoires publics, il risque d’entraîner avec lui d’autres élèves ou parents d’élèves vers une escalade de la violence.

Décembre 2023 : une enseignante d’un collège des Yvelines est victime de diffamation. Les professeurs expriment leur crainte, ils ressentent du danger dans un contexte où l’affaire Samuel Paty résonne encore. Ils prennent immédiatement la décision d’exercer leur droit de retrait(5).

Exercer son droit de retrait en cas de danger

Si la diffamation est de nature à mettre la victime en danger dans le cadre de ses fonctions, il est recommandé d’exercer son droit de retrait.

Faire supprimer le contenu diffamatoire

Lorsque les propos sont fixés sur un support écrit, il faut demander à l’auteur de détruire le support ou d’effacer les publications. En cas de diffamation sur internet, la demande de retrait de la publication ou des commentaires est d’abord adressée à son auteur ou au responsable du site ou du réseau social et, en cas de refus, à l’hébergeur du site.

Pour inciter l’auteur des faits ou l’hébergeur à retirer rapidement le contenu préjudiciable, il est recommandé d’adresser sa demande par recommandé avec AR. L’aide d’un avocat est précieuse dès cette étape de la procédure.

Si le contenu n’est pas retiré, vous pouvez faire un signalement en ligne et en cas d’urgence, avec l’aide de l’avocat Conseil de l’ASL, il conviendra de saisir le tribunal judiciaire en référé pour faire retirer les propos ou vidéos litigieuses. 

Rassembler les preuves

Avant la suppression des contenus en ligne, il faut veiller à en conserver des preuves pour appuyer son recours en justice : captures d’écran, constat d’huissier, etc.

Porter plainte avec constitution de partie civile

Porter plainte avec constitution de partie civile permet d’ouvrir une enquête, pour ensuite déclencher une procédure judiciaire devant le juge pénal. En cas de succès au procès :

  • L’auteur de la diffamation est sanctionné.
  • La personne victime de préjudice moral est indemnisée.
Demander la protection fonctionnelle

Les enseignants bénéficient de la protection fonctionnelle(6). À ce titre, ils peuvent obtenir un accompagnement humain et financier tout au long de la procédure qui les oppose à l’auteur de la diffamation.

Le conseil de L’ASL

Si vous pensez être victime de diffamation dans l’exercice de votre métier, ne restez pas seul·e. Sollicitez les conseils de L’ASL, de ses militants et de ses avocats-conseil. Ils sont à vos côtés pour vous écouter, vous soutenir et vous orienter.

Ils pourront apprécier le cadre juridique et, si nécessaire, vous accompagner dans vos démarches.

Sources

  1. Baromètre l’ASL 2022 sur le climat scolaire et la relation dans les établissements (PDF)
  2. Article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse
  3. « Une enseignante condamnée pour injures et diffamation dans la polémique de l’IEP de Grenoble », 11 janvier 2023, France Bleu
  4. Article 433-5 du Code pénal
  5. « Calomnie et diffamation : au collège Cartier (78), les profs inquiets lancent un appel au secours », 10 décembre 2023, Marianne
  6. Article L134-5 du Code général de la fonction publique