La loi définit précisément les obligations en matière de signalement. Quelle est la procédure à suivre dans le cadre du signalement et quelles sont les suites ? Me Lidwine Simplot, avocat-conseil de la délégation du Doubs, apporte des éléments de réponse.

Maître, pouvez-vous nous expliquer ce qu’est le signalement ?

Le signalement consiste à alerter l’autorité judiciaire, en l’occurrence le procureur de la République, de la situation de maltraitance vécue par un mineur, lorsqu’il court un danger grave et imminent.

Le signalement est à distinguer de l’information préoccupante, puisque celle-ci consiste à adresser une information à une cellule départementale sur la situation d’un mineur en danger ou potentiellement en danger. 

Le signalement, c’est le degré au-dessus. C’est la saisine de l’autorité judiciaire, uniquement en cas de danger grave et imminent. La loi précise qu’un mineur est en danger quand sa santé, sa sécurité, sa moralité et les conditions de son développement affectif et social sont gravement compromises. 

Concrètement, pouvez-vous nous indiquer quelles sont les obligations pour les personnels d’éducation ?

Il appartient à l’équipe enseignante d’identifier, d’une part, l’existence d’un danger et, d’autre part, l’existence d’un danger grave et immédiat. Le signalement interviendra uniquement dans des cas graves, par exemple en cas de violences physiques, d’abus sexuels ou de maltraitance grave. 

D’une manière générale, la loi impose à chacun d’agir et de dénoncer les faits quand il a connaissance de la situation d’un enfant en danger. Si on ne le fait pas, on peut être poursuivi pour non-assistance à personne en danger. Ces dispositions, qui s’appliquent à tous, sont plus contraignantes pour les personnels de l’Éducation nationale, puisque le Code pénal leur impose de dénoncer sans délai au procureur de la République tout crime ou délit dont ils ont connaissance dans l’exercice de leurs fonctions. 

La hiérarchie ne se substitue pas à la responsabilité individuelle de celui qui a connaissance d’un crime ou d’un délit. En d’autres termes, si un enseignant a connaissance d’une situation grave concernant un mineur, il doit procéder à un signalement, même en cas de refus de son supérieur hiérarchique. 

Pourriez-vous nous expliquer les étapes à suivre pour établir un signalement en milieu scolaire ?

En cas de danger grave et imminent, la première règle à suivre, c’est de ne jamais rester seul. C’est de confronter son point de vue et d’alerter le directeur de l’école ou le chef d’établissement. 

Le signalement est un écrit adressé au procureur de la République du tribunal de grande instance du ressort de l’établissement scolaire. C’est un écrit objectif qui ne doit pas contenir de remarques personnelles. Il doit être factuel et rappeler les circonstances dans lesquelles l’enfant a fait des révélations. Une copie de cette transmission doit être adressée au directeur d’école ou au chef d’établissement, si ce n’est pas lui qui procède à ce signalement, ainsi qu’à l’inspecteur de l’Éducation nationale et au service académique. 

Quelles sont les suites possibles ?

À réception de ce signalement, le procureur a plusieurs possibilités : 

Il peut arriver que les parents d’un mineur ayant fait l’objet d’un signalement, et dont les faits n’ont finalement pas été établis, envisagent de rechercher la responsabilité de l’enseignant auteur du signalement. Si une telle action en responsabilité est possible, les tribunaux y font très rarement droit, sauf à justifier que l’enseignant savait que les faits qu’il dénonçait étaient erronés. Dans cette hypothèse, l’enseignant pourrait être poursuivi pour dénonciation calomnieuse. Pour le reste, il est extrêmement difficile d’invoquer la responsabilité de l’enseignant pour des erreurs d’interprétation d’un cas de maltraitance. 

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